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Taiwan discute avec Amazon Kuiper pour sécuriser ses communications via satellites, face aux tensions avec la Chine et aux défis d’Eutelsat OneWeb.
Taiwan intensifie ses efforts pour protéger son infrastructure numérique face aux menaces chinoises. Le gouvernement explore une coopération avec Amazon Kuiper pour intégrer une constellation de satellites en orbite basse, capable de fournir des communications sécurisées. Le réseau actuel, opéré par Eutelsat OneWeb, est jugé insuffisant en termes de bande passante et de capacités. Taiwan vise également à développer sa propre constellation de satellites, tout en diversifiant ses partenariats internationaux pour réduire sa dépendance. L’objectif est d’assurer une résilience stratégique en cas d’attaque contre les câbles sous-marins reliant l’île au reste du monde.
La recherche de solutions face aux limites d’Eutelsat OneWeb
Le partenariat entre Taiwan et Eutelsat OneWeb a montré des failles importantes. Selon Wu Cheng-wen, ministre de la Technologie, la bande passante offerte par OneWeb ne répond pas aux besoins réels du pays. De plus, les retards perçus dans le développement de la deuxième génération de satellites suscitent des inquiétudes, bien que Eutelsat OneWeb ait affirmé qu’il n’y avait aucune difficulté financière ni retard.
Eutelsat présente cependant des défis structurels : sa dette nette atteignait quatre fois ses bénéfices avant intérêts et taxes en septembre 2023. De plus, des ajustements récents des prévisions de revenus pour 2024 et 2025 révèlent une incertitude sur la viabilité économique de ses projets. Ces limitations poussent Taiwan à diversifier ses partenaires pour garantir une infrastructure résiliente.
Amazon Kuiper : une alternative prometteuse
Amazon Kuiper, en phase avancée de développement, est perçu par Taipei comme une solution plus fiable. Avec des satellites en orbite basse (LEO) à environ 500-2 000 km d’altitude, Kuiper promet un service compétitif dès 2024. La faible latence de ces réseaux LEO en fait une option viable pour des communications robustes, même en cas de coupure des câbles sous-marins.
L’approche modulaire et l’expertise logistique d’Amazon offrent des garanties. Le projet prévoit de lancer plus de 3 200 satellites, à l’instar de la constellation Starlink. Cette capacité répond à la demande croissante pour des communications sécurisées, tant pour les institutions publiques que pour le secteur privé.
L’exclusion de Starlink : enjeux politiques et stratégiques
Malgré son efficacité démontrée en Ukraine, Starlink, opéré par SpaceX, n’est pas envisagé par Taiwan. Les raisons sont multiples. Tout d’abord, les intérêts économiques d’Elon Musk en Chine posent un risque potentiel. Musk a publiquement soutenu des positions favorables à Pékin concernant la souveraineté de Taiwan, ce qui complique toute coopération stratégique.
De plus, les exigences de Taiwan, notamment une participation majoritaire d’au moins 50 % dans toute entreprise conjointe, ont été rejetées par SpaceX. Ces conditions visent à garantir un contrôle souverain sur les infrastructures critiques, une priorité face aux pressions extérieures.
Une stratégie nationale pour l’autonomie spatiale
En parallèle des discussions internationales, Taiwan développe son propre programme spatial. Le gouvernement prévoit de construire une constellation de satellites en orbite basse sous l’égide de l’agence spatiale nationale. Une base de lancement dans le sud-est de Taiwan est en cours de planification, avec des lancements prévus d’ici cinq ans.
Cette initiative vise à réduire la dépendance envers des partenaires étrangers tout en renforçant les capacités locales. L’investissement dans des lanceurs et satellites nationaux permettra également de répondre aux besoins spécifiques de défense et de communication.
Conséquences économiques et géopolitiques
Les efforts de Taiwan pour sécuriser ses communications illustrent l’importance stratégique des satellites dans les conflits modernes. En cas d’attaque chinoise, la destruction ou le sabotage des câbles sous-marins pourrait isoler l’île. Les réseaux LEO, tels que ceux proposés par Kuiper, offrent une redondance essentielle.
Cependant, ces initiatives ont un coût. Le développement d’une constellation nationale pourrait dépasser les 500 millions d’euros, selon les estimations. À cela s’ajoutent les dépenses liées à la mise en place d’une base de lancement et au maintien des infrastructures.
Sur le plan géopolitique, les choix de Taiwan renforcent ses alliances avec les pays occidentaux, tout en exacerbant les tensions avec la Chine. Ces décisions mettent en lumière la dépendance croissante des gouvernements envers des entreprises privées pour répondre à des enjeux stratégiques.