L’avenir de l’exploration spatiale appartient aux robots et aux milliardaires
Nous sommes peut-être nostalgiques des astronautes, mais nos capacités scientifiques ont dépassé nos capacités physiques.
La publication par la Nasa des images étonnantes obtenues par le télescope spatial James Webb, le successeur bien plus performant du télescope spatial Hubble, marque une nouvelle ère de l’observation astronomique dans l’espace. Ce merveilleux instrument va révéler des informations inédites sur une foule de sujets allant des planètes qui orbitent autour d’autres étoiles à la naissance des galaxies et aux premières années de l’univers lui-même, ouvrant nos yeux métaphoriques sur le cosmos comme jamais auparavant.
L’emplacement du JWST illustre également pourquoi les explorateurs robotiques sont désormais supérieurs aux humains dans l’espace. En décidant de s’en remettre à la navette spatiale orientée vers les astronautes pour placer le Hubble sur son orbite, la Nasa a condamné ce télescope à rester à 340 miles au-dessus de la surface de la Terre. À cette altitude modeste, le télescope souffre considérablement de la lumière réfléchie par la surface de la Terre, un peu comme si les astronomes avaient construit les télescopes terrestres modernes à Greenwich plutôt qu’à Hawaï ou au Chili.
En revanche, le JWST est maintenant en orbite autour de la Terre et du Soleil au point appelé « L2 », à près d’un million de kilomètres. Cet emplacement spécial offre une stabilité orbitale ainsi que l’obscurité et les températures froides de l’espace.
Mais n’est-il pas vrai que les astronautes ont effectué cinq voyages vers le Hubble pour réparer et améliorer son miroir et ses instruments ? En effet, ces missions, qui se sont déroulées entre 1993 et 2009, ont non seulement permis d’installer des lentilles correctrices mais aussi de moderniser les miroirs, de remplacer ses gyroscopes et de prolonger la durée de vie du télescope bien au-delà de ce que la Nasa avait osé espérer. Ils représentent de loin la plus grande contribution des astronautes à l’exploration du cosmos.
Néanmoins, la Nasa n’a jamais envisagé une conception du JWST qui permettrait aux astronautes de réparer leur chef-d’œuvre de 10 milliards de dollars. Il existe une énorme différence entre lancer des humains en orbite proche de la Terre et les envoyer bien au-delà de la Lune. Le JWST a été construit pour fonctionner de manière robotique, en répondant aux commandes envoyées depuis la Terre par ses suzerains humains.
Des considérations similaires s’appliquent à un voyage vers Mars, un voyage plus de 100 fois plus long que celui du JWST, qui prend environ sept mois. Les humains ont maintenant envoyé près de 50 vaisseaux spatiaux robotisés vers la planète rouge, chacun d’entre eux ayant passé de nombreux mois sans avoir besoin d’eau, de nourriture ou d’oxygène. Certaines de ces missions ont réussi, d’autres ont échoué, laissant des déceptions mais aucune catastrophe comparable à la perte d’astronautes.
Aujourd’hui, le rover Persévérance de la Nasa et l’hélicoptère qui l’accompagne ont commencé un examen détaillé du delta d’une ancienne rivière martienne, un endroit privilégié pour rechercher des signes de vie ancienne. Contrairement aux précédents rovers Spirit et Curiosity, qui devaient être guidés depuis la Terre autour de chaque rocher, Perseverance peut gérer le terrain par lui-même. Les futurs rovers auront des capacités encore plus grandes. Grâce au talent humain, nos robots deviennent de plus en plus compétents, alors que nos corps ne le sont pas. Le besoin pratique d’astronautes diminue donc, que ce soit pour l’exploration ou pour l’assemblage de structures dans l’espace.
Néanmoins, les humains réagissent le plus profondément aux autres humains – un fait qui pousse beaucoup à espérer que certains d’entre nous feront l’expérience d’un autre monde « pour de vrai » plutôt que par procuration. Mais envoyer des astronautes, leur fournir les moyens de survivre dans les environnements hostiles de Mars et, surtout, les ramener sains et saufs sur Terre, coûterait des centaines de milliards de dollars. Si le coût est si élevé, c’est parce que les contribuables exigent de la Nasa qu’elle soit très attentive à la sécurité lorsque la vie de civils financés par des fonds publics est en jeu.
De telles entreprises, qui sont en effet source d’inspiration, devraient être laissées aux milliardaires et aux sponsors privés, qui peuvent entreprendre des projets à prix cassés qui lancent des aventuriers en quête de sensations fortes, prêts à accepter des risques élevés – même des allers simples.
Il est toutefois illusoire de croire qu’une planète hostile peut d’une manière ou d’une autre être « terraformée » pour offrir un environnement semblable à celui de la Terre. Il n’y a pas de « planète B » pour les personnes ordinaires qui ont peur du risque. (Et cette perspective ne doit pas servir d’excuse pour éviter de réparer les effets négatifs de notre « terraformation » de la Terre)
Pendant au moins les 20 prochaines années, les efforts financés par des fonds publics devraient continuer à affiner nos capacités robotiques, à envoyer ces émissaires explorer le système solaire et à les utiliser pour fabriquer de grandes structures dans l’espace, comme des capteurs d’énergie solaire. Les vols spatiaux habités – au moins au-delà de l’orbite terrestre basse – devraient être laissés aux milliardaires.
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